Le 4 juillet 2012 au Cern, le plus grand centre de physique des particules au monde situé sur la frontière franco-suisse, est rassemblé le gratin des physiciens théoriques. L’annonce officielle de la découverte du boson de Higgs tombe et soulève émotion et enthousiasme. On l’attendait depuis près de 50 ans, depuis que le Britannique Peter Higgs et les Belges François Englert et Robert Brout avaient théorisé son existence en 1964.
Le Modèle standard
Ce modèle du fonctionnement de l’infiniment petit (1) souffrait d’un grave problème lié au défaut de compréhension de l’existence d’une masse pour certaines particules. La théorie de Higgs-Englert-Prout, alors hypothétique, pouvait permettre de sortir le Modèle standard de l’impasse dans lequel il était. Elle prédisait l’existence du champ de Higgs, dont la manifestation quantique, la particule associée, est le boson de Higgs. Sa traque allait commencer, plus particulièrement au début des années 1990.
C’est quoi la masse ?
Pour nous tous, la masse c’est ce qui traduit la quantité de matière d’un objet, plus ou moins massif. C’est ce qui donne le poids dans un champ de pesanteur, ou ce qui résiste à une force qu’on lui applique (2). C’est une propriété consubstantielle de la matière, l’une n’allant pas sans l’autre.
Mais plus précisément, qu’est-ce qui est derrière cette propriété ? Quels mécanismes sont à l’œuvre ?
Le champ de Higgs
Les trois physiciens avaient postulé l’existence d’un champ, le champ de Higgs, qui remplit la totalité du vide de l’univers de façon uniforme. Comme tout champ (3), il interagit avec les particules élémentaires qui s’y déplacent, plus ou moins fortement. Il les ralentit plus ou moins, ce qu’on traduit par une inertie, comme si ces particules avaient une masse plus ou moins grande.
La masse des particules n’est donc pas une propriété intrinsèque qui résulte du fait qu’elles sont faite de matière, mais une propriété qu’elles acquièrent du fait de leur couplage plus ou moins fort avec le vide rempli du champ de Higgs. Vide qui n’est donc pas vide.
Toutes les particules n’ont pas de masse ; certaines n’ont aucune interaction avec le champ de Higgs, et ont donc une masse nulle. C’est le cas par exemple du photon qui va donc à la vitesse de la lumière.
De même que dans un champ électromagnétique un boson (le photon) sert de particule médiatrice entre des particules chargées, des électrons par exemple, ici la particule médiatrice est le boson de Higgs.
Au CERN, on le traque
Pour espérer trouver un boson de Higgs, il fallait des collisions de particules à très hautes énergies, avec un outil exceptionnel, l’accélérateur de particules du Cern.
Un tunnel de 27 km de circonférence, un tube sous vide dans lequel on fait circuler des paquets de protons à une vitesse proche de celle de la lumière, des énergies colossales, des énormes détecteurs de particules, des milliers de physiciens, des milliards dépensés… tout est gigantesque.
On va faire circuler en sens opposés des paquets de milliards de protons, qui se croiseront 30 millions de fois par seconde, engendreront 600 millions de collisions par seconde et des milliers de particules différentes, dont les rares bosons tant attendus.
Toutes les informations recueillies forment une masse de données numériques tellement énorme qu’il est impossible de la traiter au Cern. C’est une organisation en réseau de 150 centres de calculs répartis dans 40 pays qui a permis d’en venir à bout, et de mettre en évidence un boson de Higgs !
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- Voir le billet Le Modèle Standard
- Voir le billet Relativité Générale – 1 – Le principe d’équivalence
- Voir le billet Champs en physique